La puissance paternelle encore appelée l’autorité parentale renvoie à l’ensemble des droits et devoirs attribués aux parents sur les enfants mineurs, non mariés et non émancipés.

La puissance paternelle est attribuée conjointement au père et à la mère pendant le mariage, mais elle est exercée par le père sauf dans des cas limitativement énumérés par la loi où l’exercice peut revenir à la mère[1].

Toutefois, elle perd ce caractère conjoint après le divorce et est accordée au parent qui obtient la garde de l’enfant[2].

Qu’en est-il dès lors lorsque les parents ont conçu un enfant sans contracter mariage ?

La réponse à cette question est donnée par le législateur sénégalais à travers deux situations.

Dans le premier cas, la puissance paternelle appartient au père si à la naissance de l’enfant naturel, la filiation (lien de parenté unissant les parents à l’enfant) est établie à l’égard des deux parents. Dans ce cas le régime juridique relatif à l’enfant légitime est appliqué à l’enfant naturel[3].

Dans le second cas, lorsque la filiation de l’enfant naturel n’est établie qu’à l’égard de la mère, celle-ci exerce la puissance paternelle[4].

Cependant, si postérieurement le père reconnaît son enfant, il peut lui être attribué à sa demande l’exercice de la puissance paternelle sur décision du juge compétent s’il y va de l’intérêt de l’enfant[5].

Cela étant précisé, quand bien même la filiation de l’enfant naturel serait établie à l’égard des deux parents, lui appliquer le même régime que celui relatif à l’enfant légitime, est critiquable à plus d’un titre.

Premièrement, en assimilant les deux régimes, le législateur partirait du postulat que les parents de l’enfant naturel vivent en bonne intelligence et participent mutuellement à tous les actes qui contribuent au bien être de ce dernier tels que son éducation, son entretien, ses frais scolaires et ses frais médicaux.

Cependant, la réalité est tout autre ; il n’est pas courant que les parents de l’enfant naturel soient en de bons termes ou encore que le père s’investisse dans la vie quotidienne de son enfant.

Quel que soit le cas de figure envisagé, l’enfant naturel est le plus souvent pris en charge de fait par sa mère et souvent sans la participation effective du père dans l’éducation et l’entretien de l’enfant.

En pareille occurrence est-il dès lors pertinent d’appliquer à cet enfant les règles relevant de celles qui régissent l’enfant légitime, sachant la place prépondérante que le Législateur accorde au père dans toute la vie juridique de l’enfant ?

En effet, la confection de certains documents administratifs (carte d’identité nationale, passeport…) ou l’accomplissement de certains actes (voyage à l’étranger…) au profit de l’enfant légitime requiert nécessairement l’autorisation du parent qui exerce la puissance paternelle en l’occurrence le père.

Assimiler les deux régimes, reviendrait alors à contraindre la mère, pour l’obtention de tout document administratif à recourir au père quand bien même ce dernier aurait abandonné son enfant ou aurait coupé tout lien le reliant à lui.

En cas d’abandon de l’enfant par le père ou tout simplement en cas de refus du père, même injustifié, de donner son autorisation, il est clair que les intérêts de l’enfant s’en trouveraient compromis.

En tout état de cause, si la mère ne peut obtenir une autorisation parentale établie par le père au profit de l’enfant naturel, elle bénéficie de la possibilité de saisir le juge compétent pour solliciter l’attribution de la puissance paternelle.

C’est donc là que se trouve l’intérêt pour le législateur de dissocier les deux régimes et d’instaurer un régime spécifique à l’enfant naturel basé sur la garde effective de l’enfant et non sur l’établissement de la filiation.

Deuxièmement, l’autre difficulté relevée tient au caractère contradictoire d’une telle action.

Il est évident qu’un parent qui est introuvable ou qui refuse de donner son autorisation pour l’établissement de certains documents administratifs pour son enfant, est enclin à ne pas comparaître à l’audience pour les mêmes raisons.

Dès lors, obliger la mère à citer le père ramènerait la situation au statu quo ante.

C’est pourquoi, le législateur devrait pouvoir permettre à la mère qui a la garde de fait de son enfant, de pouvoir en officialiser l’exercice de la puissance paternelle sans qu’il soit besoin que le père soit cité.

Un tel jugement d’attribution de la puissance paternelle serait par la suite signifié au père s’il est géographiquement localisable ou à tout le moins soumis à la publication dans un journal d’annonces légales pour en assurer l’opposabilité.

En tout état de cause, si l’intérêt de l’enfant constitue la condition fondamentale pour se faire attribuer la puissance paternelle, le régime juridique de son attribution devra en être facilité.

 

[1] Article 277 du code de la famille

[2] Article 278 du code de la famille

[3] Article 281 alinéa 1 du code de la famille

[4] Article 281 alinéa 2 du code de la famille

[5] Ibid.